Affaire de la déportation des homosexuels : la justice a "perdu" le dossier de Christian Vanneste
Les mots sont souvent, non les signes, mais les masques de la réalité. Parfois même la fréquence de leur emploi doit alerter sur l’absence de la chose qu’ils désignent. La France est-elle un État de droit, une république, une démocratie ? Plus ces mots sont employés avec le ton solennel et pontifiant conseillé, plus l’évolution politique permet d’en douter. Mon expérience concrète m’assure qu’elle ne l’est plus.
Je vis depuis plus de huit ans une chasse aux sorcières qui a torpillé mon activité politique. Il y a un an, interrogé par un site catholique confidentiel sur la raison pour laquelle une majorité des Français semblait favorable au mariage homosexuel, je développais la thèse suivant laquelle le « lobby gay » disposait d’une puissance médiatique disproportionnée, dont les adversaires du mariage unisexe prennent sans doute conscience en ce moment même. Fort de sa domination dans les médias, il use d’une désinformation systématique, notamment fondée sur la victimisation des homosexuels.
Je prenais l’exemple de la légende de la déportation des homosexuels en France, à l’exception des trois départements rattachés au Reich. Serge Klarsfeld confirmait mes propos. La lecture de l’étude menée par Mickaël Bertrand ou de l’ouvrage de Patrick Buisson sur les Années érotiques de l’occupation me donne entièrement raison. Cela n’a pas empêché les crétins de l’UMP, ni la presse pavlovienne de me traiter de tous les noms. Sarkozy s’y est mis. Bien sûr la gauche s’en est donnée à cœur joie. C’était la démonstration de la justesse de mes propos puisque tous étaient convaincus d’une chose totalement fausse.
Comme il y a des limites à la bêtise qui la rend insupportable, j’ai assigné ceux qui osaient parler à mon encontre de négationnisme. Je n’ai jamais nié la déportation, ni les six millions de victimes de la Shoah, et ceux qui m’ont entendu à Auschwitz parler au nom du groupe UMP que j’y représentais ne peuvent avoir le moindre doute à ce sujet. Ce que je nie, c’est l’existence d’une politique de déportation des homosexuels français depuis le territoire national, par les Allemands, les collaborateurs ou les « autorités » de Vichy. J’ajoute que beaucoup d’homosexuels n’ont pas eu à se plaindre de leur situation à cette époque, à commencer par le ministre de Pétain, Abel Bonnard, et bien d’autres. Ce que je dénonce c’est la manœuvre victimaire fondée sur le mensonge afin de créer un climat favorable aux revendications.
J’ai donc assigné L’Express qui avait utilisé ce terme de « négationniste » à mon encontre. LE PROCÈS N’AURA PAS LIEU. LE DOSSIER A DISPARU, le temps du délai de prescription. Si ça vous rappelle la Scientologie, je crains que vous n’ayez raison.
Mon avocat a donc écrit une lettre ouverte au ministre de la Justice. Celle-ci l’informe que j’engage une action en responsabilité pour faute lourde et déni de Justice contre l’État français. Je déposerai, par ailleurs, une plainte pour vol afin qu’on puisse savoir qui a subtilisé le dossier le temps de la prescription. Lorsque la République ne traite pas tous les justiciables avec égalité, elle n’est plus la République. Lorsqu’une démocratie privilégie des minorités, elle n’est plus une démocratie. Lorsque la Justice trébuche ou devient partiale, l’État de droit disparaît pour ne laisser place qu’à un rapport de forces.
C’est d’ailleurs ce qu’a reconnu avec cynisme le rapporteur au Sénat de la la loi sur le mariage et l’adoption pour des personnes de même sexe, Jean-Pierre Michel, en affirmant que le « juste » était ce qui est conforme à la loi, et la loi, l’expression d’un « rapport de force à un moment donné ». Un parlementaire juriste qui fait dépendre le droit de la force, ça fait froid dans le dos, mais peut-être cela éclairera-t-il ceux qui ont un doute sur la nature du pouvoir actuel.
Christian Vanneste
LETTRE OUVERTE A MADAME TAUBIRA
Madame le Ministre,
J’ai l’honneur de vous écrire pour vous faire part de faits graves et inadmissibles et qui mettent directement en cause le fonctionnement du ministère de la Justice et le droit pour tout justiciable de faire valoir ses droits devant un Tribunal impartial.
Or ce droit imprescriptible a été manifestement violé à la suite de la perte par vos services du dossier de mon client.
J’ai en effet l’honneur d’intervenir pour Monsieur Christian VANNESTE qui m’avait désigné pour engager une action en diffamation contre le journal l’Express. Ce journal avait imputé à mon client le fait d’avoir tenu des propos « négationnistes » à l’occasion d’une interview accordée à l’association « Liberté Politique ».
Pour mémoire, cette affaire avait fait grand bruit mon client ayant déclaré qu’en France, il n’y a avait pas eu de déportations d’homosexuels en raison de leur pratique sexuelle. En dépit des hurlements du chœur habituel des vierges effarouchées, Serge Klarsfeld confirmait le bien fondé de ces propos qui étaient étayées notamment par la parution d’un ouvrage réalisé par Mickaël BERTRAND et intitulé « La déportation pour motif d’homosexualité en France ».
Une consignation avait été versée par mon client et une date de plaidoiries était prévue le 6 novembre dernier devant la 14ème Chambre correctionnelle de Nanterre. Mon contradicteur n’avait produit aucune offre de preuve, ce dernier se contentant d’invoquer la liberté d’expression.
Le jour venu, nous sommes conviés par la Présidente de la Chambre, mon confrère adverse et moi-même, à nous rendre dans son bureau quelques minutes avant l’audience. Celle-ci nous annonce avec une légèreté déconcertante que le dossier avait été perdu lors d’une audience interruptive de prescription prévue le 5 septembre avant de réapparaître miraculeusement quelques jours avant l’audience de plaidoirie.
Comme vous le savez, en matière de presse, le délit de prescription est de trois mois et il est nécessaire, lorsque l’affaire est fixée à une date lointaine, de prévoir des audiences interruptives de prescription. Or, le 5 septembre 2012, le dossier avait disparu.
Il y a deux choses inadmissibles dans cette affaire : la disparition d’un dossier mais aussi la désinvolture d’un magistrat qui, manifestement trop heureuse de se débarrasser de ce dossier, n’a pas pris la peine de m’avertir de cette difficulté de manière à ce que je puisse pallier les négligences des services du Tribunal.
Je n’ignore pas les problèmes d’encombrement de la Justice. Il y a déjà des pertes de dossier par le passé. Je me rappelle notamment de la disparition des dossiers lors des poursuites contre l’Église de scientologie.
Et dans cette affaire ô combien sensible qui intervient au moment du débat sur le mariage dit « pour tous », cette perte de dossier n’est pas anodine. Et pour tout vous dire, je ne crois pas un seul instant à une simple négligence.
Car parallèlement, un procureur de la République de Paris a, de sa propre initiative engagé une action contre mon client à la suite d’une partie de ses propos tenus le même jour sur le site de Liberté Politique. Cette initiative individuelle de ce parquetier et ce alors même qu’aucune association homosexuelle n’avait cru bon engager d’action, dans ce contexte particulier de débat sur le mariage gay, m’interpelle.
Alors même que vos services engagent de leur propre chef et ce, au nom de la société, une action tendant à museler la parole sur la question du mariage dit « pour tous », ces derniers perdent le dossier de mon client le privant de la possibilité de faire valoir ses droits en justice et de laver son honneur des imputations graves portées à son encontre.
Naturellement et dans ces conditions, j’ai reçu instruction d’engager une action en responsabilité pour faute lourde contre votre administration. Mais je n’en resterai pas là : Comme je l’ai indiqué, je ne crois pas un seul instant à une simple négligence laquelle serait en soi, déjà inadmissible : c’est pourquoi je porterai également plainte pour vol afin que toute la lumière soit faite sur le cheminement de ce dossier et j’exigerai la communication dans la procédure du nom de tous les auxiliaires de justice qui ont pu avoir accès à cette procédure.
Je vous prie de croire, Madame le Garde des Sceaux, en ma considération déçue.
Frédéric PICHON
- Source : Egalité et Réconciliation