Témoignage d’une enfant adoptée sur le mariage gay
J’écris ce témoignage pour répondre à un certain nombre d’arguments donnés par les pros-mariage et pour faire entendre la voix des enfants adoptés au travers de mon histoire et ressenti personnel. Je ne donne pas mon nom complet car en tant que fonctionnaire je suis tenue au devoir de réserve.
Je m’appelle Bénédicte, j’ai 34 ans et travaille comme assistante sociale. J’ai été légalement adoptée à l’âge de 9 mois et accueillie dans ma nouvelle famille à l’âge de 6 mois. Ma mère naturelle m’a abandonnée 7 jours après ma naissance, ne pouvant me garder. Elle a préféré me confier à l’adoption, afin que j’aie la chance d’avoir une vraie famille : un père et une mère.
Je n’ai que très peu d’informations sur mes origines (je serais née d’une mère allemande et d’un père américain), ma mère ayant demandé le droit au secret, ce qui se rapproche d’une adoption sous X. Elle est venue accoucher en France et a déclaré s’être fait voler se papiers à la gare. Elle aurait manifesté le désir, non concrétisé, de venir me chercher avant la fin des 3 mois légaux au bout desquels elle perdait définitivement ses droits parentaux.
Mes parents ont adopté une autre enfant un an après mon arrivée au sein de leur foyer, puis ont eu 3 autres enfants naturels. Il est important tout d’abord de souligner que les parents sont ceux qui mettent au monde ou adoptent un enfant et l’élèvent jusqu’à sa majorité (et souvent au-delà) et l’accompagnent généralement tout au long de leur vie. Les parents adoptifs d’un enfant sont ses vrais parents, les parents naturels étant des géniteurs.
A l’adolescence, je me rappelle la difficulté à me construire en tant qu’adulte, le rejet fort à l’égard de mes parents, avec des mots très durs dans les moments de conflits : « tu n’es pas ma mère ! Tu n’as rien à me dire. Je te déteste. Vous n’êtes pas mes parents ». Comme un désir de faire payer à cette famille, qui m’avait accueilli de son mieux, le rejet, l’abandon dont j’avais fait l’objet de la part de mes géniteurs. Un besoin constant de tester les limites, de chercher à provoquer l’abandon.
Mes parents ne m’ont jamais caché mon adoption. Je l’ai comprise à l’âge de 4 ou 5 ans, lorsque ma mère attendait une de mes sœurs. Ma réaction fut un sentiment d’injustice exprimée au travers d’un mot d’enfant : « c’est pas juste, pourquoi il est né de ton ventre et pas moi ! ». Explications rassurantes, pleines d’amour : « mais toi, on t’a choisi, on te voulait tellement fort.» Et l’enfant rassérénée a oublié, confortée par l’amour de ses parents. Redécouverte de cette différence vers l’âge de 8 ou 9 ans, réaction violente de rejet, de chagrin. Soutien fort des grands-parents, oncles, tantes, parrain et marraine, que je remercie du fond du cœur.
Je me rappelle la réaction de certains enfants à l’école, qui s’en sont pris à moi à cause de cette différence, l’un des épisodes les plus marquants étant celui d’une fillette de ma classe, en CM2, qui m’a montrée du doigt dans la cour de l’école en criant « l’adoptée, l’adoptée », comme si c’était une tare, une injure. J’ai depuis compris que cette enfant vivait elle-même une situation familiale difficile, un divorce parental.
Un enfant adopté a besoin de stabilité, et de la complémentarité homme/femme, père/mère, de l’altérité dans la parité. Quelle petite fille n’a pas vu (ou désiré avoir) en son père un héros, un protecteur ? Et en sa mère une princesse, une tendresse pleine d’amour à qui se confier ? Les bras d’un père, les bras d’une mère, deux émotions si fortes, si primaires, si différentes, si essentielles et complémentaires. Tant l’homme que la femme sont indispensables au bon développement d’un enfant.
Un enfant adopté est un enfant fragile, déjà blessé. Les parents qui vont l’accueillir vont devoir être structurants, stables, dans une continuité, afin de rassurer cet enfant. Ils devront l’accompagner dans un processus de guérison. A mon arrivée chez mes parents, je souffrais d’un trouble alimentaire : je refusais de manger si l’aliment n’était pas sucré. Je compensais l’absence d’amour maternel par la nourriture. Ma mère a mis plusieurs mois à me réhabituer à une alimentation saine. Les parents adoptifs ne sont souvent pas préparés à cela. Je suis très reconnaissante envers mes parents : malgré toutes nos difficultés, ils ont été là pour moi, ils m’ont donné un cadre, une structure, un foyer stable. Tout n’est pas parfait, l’adolescence fut difficile, douloureuse, mais nous avons aujourd’hui un dialogue, de bonnes relations. Ils m’ont appris l’importance, le sens de la famille, transmis des valeurs, m’ont aidé à me construire.
Un enfant, qui sait qu’il a été adopté, pourra avoir différents types de réactions envers ses parents : il pourra chercher les limites, se montrer difficile, infernal même, comme pour provoquer l’abandon de nouveau, parce ce que c’est ce qu’il redoute le plus, sa crainte inavouée (abandonner avant d’être abandonné). Ce fut mon attitude.
Un autre cherchera plutôt à entrer dans les bonnes grâces de ses parents, désireux de leur plaire, d’être l’enfant idéal à leurs yeux, comme le fit ma seconde sœur. Cela peut amener à des dérives graves. Je pense à cet enfant au Etats-Unis, élevé par un couple de lesbiennes, qui a demandé, depuis l’âge de 8 ans, à changer de sexe pour devenir une femme, ce qui semble ravir ses mères. Ces femmes l’ont adopté lorsqu’il avait environ 5 ans. Quel doit être la crainte de ce petit de retourner en orphelinat, s’il ne correspondait pas à l’attente de ses mères ! Ne serait-ce pas une sorte de « syndrome de Stockholm », induit consciemment ou inconsciemment par l’attitude de ses mères adoptives, qui a créé son désir de devenir une fille ?
Parlant sans complexe et librement de mon adoption, des difficultés rencontrées avec mes parents adoptifs, j’ai au long des années rencontré de nombreux autres enfants adoptés ou parents adoptifs, au détour de conversations, dans les lieux les plus divers (travail, soirées, voyages…)
Certains enfants ont traversé le monde pour rechercher leur « mère naturelle », beaucoup ont rencontré de grandes difficultés au moment de l’adolescence, période cruciale dans la construction identitaire.
Un adolescent qui se construit a besoin de rejeter dans un premier temps les valeurs et mœurs de ses parents, avant de décider s’il souhaite les adopter. C’est le moment de la « crise d’adolescence », la recherche de son identité propre. Cette période qui peut se passer de façon très calme, naturelle, sans heurts, peut également être très violente, difficile à vivre tant pour l’enfant que pour ses parents, qui peuvent se sentir dépassés.
Nous avons tous besoin de savoir d’où nous venons pour savoir qui nous sommes. Regardons le nombre de livres d’histoires existants, d’archéologues, d’historiens qui cherchent à retracer le passé, de généticiens qui recherchent le commencement de l’espèce humaine et le moment où l’homme s’est détaché du «dernier ancêtre commun » (commun aux primates et à l’homme).
Certains enfants se poseront la question de leurs origines très tôt. Pour d’autres, cela ne viendra qu’à des moments clefs de la vie, comme la naissance d’un enfant, la perte de leurs parents…
Il suffit de voir, aux USA, les enfants nés de donneurs de sperme, qui sont très nombreux à rechercher leur géniteur. Malgré ce que l’on essaie de nous faire croire aujourd’hui, être un « enfant éprouvette » n’est pas anodin. Et la recherche des origines n’est pas liée à l’amour donné par les parents adoptifs. Cette interrogation se situe à un niveau bien plus primaire et vital.
Ne pas savoir d’où l’on vient est douloureux, tout au long de la vie. Se construire dans cette absence est très difficile. Cela revient à essayer de construire une maison en pierre sur des sables mouvants. C’est possible, mais complexe.
Et aujourd’hui, le gouvernement, le peuple bien-pensant, animés pour la plupart de bonnes intentions mais ne connaissant pas le sujet, voudraient rajouter à ces enfants déjà blessés, fragiles, une complication supplémentaire ?
Car à la construction de l’identité (« le moi, le surmoi et le ça » de Freud) va s’ajouter la difficulté de la construction de l’identité sexuelle ! Qui sera confuse. Comment l’enfant pourra-t-il faire son « complexe d’Œdipe », dans lequel la petite fille est censée rejeter sa mère (qui ne lui donne pas le phallus désiré) et se tourner vers son père (qui le possède) ? Comment le petit garçon pourra-t-il tomber amoureux de sa mère et souhaiter la mort de son père, s’il n’a que deux mères ou deux pères ? Les hommes ou femmes de l’entourage (oncles, tantes, amis) ne peuvent tenir ici la place du parent.
Cela semble mineur pour certains, mais on sait que ce stade est nécessaire, indispensable dans la construction de l’enfant (sauf à en croire la théorie du Gender, qui amène à des dérives incroyable : une loi est en projet dans une des régions du pays pour interdire aux garçons d’uriner debout, car leur apprendre cela serait induire chez eux une notion de masculinité, les influencerait et leur ôterait la possibilité de se construire dans une neutralité, de choisir leur genre par eux-mêmes à l’âge adulte).
Il est bien connu que les enfants adoptés, perdus, séparés de leurs familles, cherchent toujours à les retrouver, à connaitre leurs origines et portent ce manque comme une blessure jamais refermée. Combien d’émissions, de films, ont-ils été faits sur ce sujet, dans tous les pays du monde ?
Cette loi du « mariage pour tous » ira contre les intérêts de tous les enfants, sur le plan psychologique et de la construction identitaire. Mais elle sera encore plus catastrophique pour les enfants adoptés, issus d’une PMA ou d’une GPA.
La question ne devrait pas être le droit à l’enfant, mais le droit de l’enfant. Je comprends parfaitement, comme chacun d’entre nous, le désir d’avoir un enfant, de contribuer à cette grande aventure humaine, à ce désir de laisser un peu de soi dans ce monde qui nous survivra, d’un enfant à aimer. Sans doute les parents de même sexe pourront-ils être de bons parents, aimants, attentifs. De même que chez les couples hétéros, certains seront de bons parents, d’autres non. Ce n’est pas lié à leur sexualité, mais à leur identité propre, à leur histoire de vie… Certains pros-mariage nous expliquent qu’il serait mieux d’ouvrir le mariage, l’adoption, la PMA et la GPA aux couples de même sexe, en opposant ce droit à celui des parents qui maltraitent leurs enfants.
Je tiens à rappeler que la maltraitance n’est généralement pas due à un manque d’amour des parents. Elle découle de différents facteurs (psychologique, vécu du parent, situation financière ou professionnelle difficile…). Certains parents sont maltraitants (maltraitances physiques, psychologiques, négligences aggravées..). Mais cela n’a pas de rapport avec l’orientation sexuelle (sauf peut-être quelques situations particulières ?)
Il n’est pas question de cela ici. Il faut bien sûr étendre les droits des couples de même sexe, afin qu’ils bénéficient de la même protection juridique, sociale, médicale que les couples hétéros. Et oui, il est important de redire que l’amour dans couple homo est aussi fort et aussi respectable que celui qui unit un couple hétéro.
Mais le mariage est un acte civil dont le but premier est de créer un foyer stable pour l’accueil d’un éventuel enfant. Ce n’est pas la reconnaissance de l’amour qui est entérinée par Mr le Maire, mais un acte juridique ! Et la France est dans une situation différente par rapport aux autres pays car de par sa constitution, mariage et filiation y sont indissociables; l’adoption plénière constitue une particularité française : la filiation première de l’enfant est effacée et est remplacée par celle des parents adoptifs. Un enfant né de Mme X, adopté par Mme Y et Mr Z sera considéré par la loi comme l’enfant biologique de Mme Y et Mr Z, lui permettant de s’intégrer totalement au sein de sa famille adoptive.
Il y a aujourd’hui environ 28.000 couples qui ont obtenu, après bien des épreuves, l’agrément les autorisant à adopter un enfant. Or il n’y a que 2.000 à 3.000 enfants à adopter, dont plus de la moitié à l’étranger. De nombreux pays ont fait savoir que si la loi française autorisait l’adoption par des couples homosexuels, ils n’autoriseraient plus l’adoption de leurs ressortissants par des français (la loi française n’autorisant pas un pays à choisir l’adoptant ni à effectuer une discrimination comme celle de choisir un couple hétéro au détriment d’un couple homo). L’argument « il vaut mieux avoir des parents homos que pas de parents » tombe à l’eau ! Par ailleurs, s’il est vrai qu’il y a de nombreux enfants en foyer ou en famille d’accueil, il est à noter que peu d’entre eux sont adoptables. Un enfant n’est adoptable que si ses parents naturels en expriment la volonté ou s’ils sont (cas très rare) déchus de leurs droits parentaux.
Je suis toujours interloquée de voir le manque de logique de notre époque. On nous parle du droit des femmes, de parité : c’est donc qu’il existe bien une différence entre les hommes et les femmes. Et pourtant, on veut enseigner à nos enfants, dans nos écoles publiques, la théorie du Gender, qui dit qu’il n’y a pas de différence entre les sexes ? On nous fait la promotion de la parité dans la société, l’emploi, mais on veut retirer cette parité de son niveau le plus essentiel et élémentaire : la Famille ?
On nous parle encore d’égalité entre les citoyens, mais on voudrait créer une inégalité entérinée par la loi (et non due à un accident ou un parcours de vie) dès la naissance ?
On nous parle de liberté d’expression et de liberté de culte, mais l’Etat impose une pensée unique (en Allemagne, des parents ont été condamnés à de la prison ferme pour avoir refusé d’envoyer leurs enfants en cours d’éducation sexuelle sur le modèle du Gender, estimant celle-ci contraire à leur religion. La cour européenne a confirmé cette condamnation, la morale laïque prévalant sur la liberté d’opinions religieuses, que les enfants soient dans des écoles publiques ou privées).
Il existe de fait des situations d’homoparentalité en France, qui sont majoritairement des familles recomposées et dont les enfants sont issus d’un père et d’une mère et non nés au sein d’un foyer homoparental. Ces enfants sont évidemment à protéger, mais leurs situations doivent être étudiées au cas par cas par les juges aux affaires familiales ! Il existe des lois (comme la délégation d’autorité parentale) qui permettent à l’autre parent du couple homo d’exercer une autorité parentale conjointe. On ne créé pas une loi pour légitimer une situation de fait. Autant sinon pousser le raisonnement jusqu’au bout : il existe beaucoup de gens qui éprouvent pour leurs animaux une très forte affection, allant jusqu’à les considérer comme leurs enfants. Pourquoi ne pourraient-ils pas les adopter ? Cela n’enlèverait aucun droit à personne et cela se fait aux USA (autre argument des pros-mariage : cela ne vous enlèvera rien, à vous, si le mariage homo passe !)
Et ceux qui ont choisi de vivre une relation incestueuse (avec un frère, une sœur, un oncle, un enfant…) ? Il y en a un certain nombre aussi. Pourquoi ne pas leur ouvrir le mariage ? Pourquoi cette discrimination ? Ils ne font de mal à personne, ils s’aiment !
Où placera-t-on ceux qui voudraient faire reconnaitre le droit des enfants « d’aimer », ces pédophiles qui cherchent à faire reconnaitre l’amour entre un enfant et un adulte ? Ils ont des sites internet (Pédopolis, Martinj), sont parfois même reçu sur des plateaux télé pour parler de leur conception de l’amour. Un de leurs arguments s’appuie sur le fait que l’homosexualité a elle aussi été considéré comme une maladie mentale jusqu’en 1986 ou comme un crime puni par la loi (c’est encore le cas dans certains pays). Et on entend, outre-Atlantique, certains médecins soutenir ce discours aberrant. Jusqu’où ira-t-on ?
Ce n’est pas l’homosexualité qui est remise en question aujourd’hui, ce n’est pas un rejet des homosexuels, il est ici question des enfants, de ce qui sera le mieux pour eux.
Sans parler de toutes les autres lois en préparation comme la loi sur l’utilisation des embryons pour la recherche, le droit de sélectionner lors de FIV (dans certains pays) certaines caractéristiques génétiques de l’enfant (début de l’eugénisme, promue par certains dont un scientifique australien), la loi sur l’euthanasie…On nous demande d’aller dans le sens de l’histoire, de ne pas être passéistes. Je réfute cet argument et vous invite à relire La République, de Platon. Nous n’avons rien inventé. L’histoire n’a pas de direction, elle se construit jour après jour, au fils de nos décisions.
Toutes les études sérieuses, et l’histoire le confirme, montrent que l’idéal pour un enfant est d’être accueilli au sein d’un foyer stable composé d’un père et d’une mère (famille nucléaire) et d’être épaulé par la famille élargie (grands-parents, oncles, tantes…). Bien sur, les accidents de la vie font que ça n’est pas toujours possible, et l’on doit aider au mieux les familles qui n’ont pas cette chance (les familles monoparentales ont souvent des grandes difficultés et doivent être soutenues).Mais de là à créer volontairement, consciemment des familles en déséquilibres, il y a un pas que nous devons refuser de franchir.
Si le modèle homme/femme n’avait pas été performant pour la reproduction de l’espèce, notre espèce se serait adaptée, comme l’ont fait certaines espèces animales (comme le crépidule, un coquillage qui change de sexe au cours de sa vie, certains lézards qui se reproduisent par parthénogénèse ou qui ne comportent que des femelles…). Ce n’est pas le cas.
Nous devons protéger nos enfants, leur garder le droit d’avoir un père et une mère. Une société a le devoir de protéger les plus faibles. Qui est plus faible qu’un nouveau-né ou qu’un fœtus ?
Protéger le mariage, c’est protéger les enfants, et vice-versa. Si cela fait de moi une homophobe, eh bien soit ! Si un homosexuel, qui s’accepte et soutient ces arguments est homophobe, que dire ?
CETTE LOI NE DOIT PAS PASSER !
Il me semble crucial que des états-généraux de la famille soient fait, avec études statistiques sur toute la population, tous les modèles familiaux, avant de pouvoir parler de changer la famille. C’est bien trop grave. Et ces études doivent être faites par des chercheurs neutres (et surtout pas par les lobbys divers) et prendre en compte tous les éléments.
Ami lecteur, merci d’avoir pris le temps de me lire. J’espère que mon témoignage pourra vous être utile. Si mes propos vous ont heurté ou blessé, je vous prie de m’en excuser.
- Source : Nouvelles de France