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Julian Assange se meurt dans l’obscurité pendant que le Washington Post se tresse des lauriers

Auteur : Adam Garrie | Editeur : Walt | Vendredi, 15 Févr. 2019 - 10h49

Lors du Super Bowl de dimanche [événement sportif le plus important des Etats-Unis - NdT], les téléspectateurs étasuniens et de nombreux téléspectateurs internationaux ont assisté au lancement d’une publicité pour le Washington Post. La publicité narrée par Tom Hanks parlait des valeurs idéales du journalisme honnête, avant de rendre hommage aux journalistes qui ont perdu la vie ces dernières années, dont le Saoudien Jamal Khashoggi, qui avait travaillé pour le Washington Post avant son assassinat au Consulat saoudien à Istanbul.

Mais lorsqu’il s’agit de journalistes confinés dans les consulats ou ambassades de pays étrangers, il y a un journaliste, éditeur et militant pour la paix incroyablement courageux qui continue de pourrir dans les minuscules chambres de l’ambassade de l’Équateur à Londres.

Julian Assange a fondé Wikileaks fin 2006 pour dénoncer les crimes de guerre et autres méfaits des pouvoirs en place. L’une de ses percées les plus importantes a été la publication des fuites de Chelsea Manning, dénonciatrice de l’armée US, concernant l’ampleur des atrocités commises par les forces étasuniennes et alliées en Irak. Depuis lors, Wikileaks a exposé les sombres réalités du camp de concentration de Guantanamo Bay, la fraude électorale aux États-Unis, les agences de renseignement qui espionnent des civils innocents et même des dirigeants d’Etats, la corruption géo-économique et l’ingérence politique illégale des États-Unis dans les affaires de nations souveraines.

Fait crucial, aucun des documents publiés par Julian Assange n’a jamais été remis en question sur une base factuelle. C’est quelque chose d’inouï dans le journalisme et c’est un record dont Assange peut être fier. Pourtant, au lieu de recevoir un prix Nobel de la paix pour avoir ouvert les yeux du monde sur les crimes qui se produisent sous le brouillard de la guerre, au lieu de recevoir des prix journalistiques importants pour son engagement à demander des comptes aux autorités, Assange languit dans une petite pièce, sans accès à l’air libre.

Assange est un prisonnier d’opinion dont la seule option est d’échanger sa cellule actuelle contre une cellule encore moins humaine et presque certainement une exécution peu après. Il ne faut jamais oublier qu’Hillary Clinton a fait remarquer un jour que l’exécution d’Assange devait être menée avec un drone militaire. Imaginez si un politicien saoudien disait cela d’un journaliste dissident ? Le Washington Post feindrait le choc dans un tel cas, mais pas lorsqu’une importante figure politique des Etats-Unis le dit à propos de Julian Assange.

Julian Assange n’est pas seulement la plus grande personnalité journalistique de notre époque, mais la plus grande de tous les temps. Personne n’a montré une telle capacité à exploiter la technologie moderne pour raconter au monde des vérités qui auraient été beaucoup plus faciles à censurer dans le passé. Mais parce que les publications d’Assange ne pouvaient pas être censurées, les pouvoirs ont décidé de censurer, réprimer et opprimer l’homme.

Depuis près d’un an, Assange est coupé de sa seule bouée de sauvetage vers le monde extérieur – l’Internet, car le président équatorien Lenin Moreno a conspiré pour poignarder Assange dans le dos plutôt que de poursuivre la cause humanitaire de son prédécesseur, l’ancien président Rafael Correa, un homme qui est maintenant lui-même persona non grata en Équateur à cause de la décision de Moreno de mettre un terme aux politiques de son prédécesseur.

Assange n’a pas vu la lumière du jour depuis près de sept ans. Au cours de la dernière année en particulier, les médecins qui ont visité Assange ont publié des rapports détaillant la grave dégradation de sa santé physique et mentale.

Alors que la publicité du Washington Post véhiculait des idéaux sympathiques, ceux qui ont suivi les trois dernières années de la politique des EU savent que la querelle ouverte entre Donald Trump et Jeff Bezos, propriétaire du Washington Post, était évidemment l’une des principales motivations du Washington Post pour acheter du temps d’antenne parmi les plus chers au monde, pendant le Super Bowl. En réalité, la publicité du Washington Post n’était guère plus que la tentative la plus coûteuse au monde de troller Donald Trump. Il est devenu clair que l’opération avait réussi lorsque Donald Trump Jr. a offert à Bezos la réponse qu’il espérait

Alors que les écrans de télévision et d’ordinateur étasuniens sont envahis par une querelle de famille entre deux Américains très riches, Julian Assange est seul, physiquement et métaphoriquement. Le slogan du Washington Post est "la démocratie meurt dans l’obscurité". Et pourtant, un homme nommé Julian Assange a essayé de rendre les hommes et les femmes à travers le monde autonomes par le savoir et, par conséquent, il se meurt littéralement dans l’obscurité.

Vidéo de la publicité du Washington Post: Washington Post Super Bowl message: Democracy Dies in Darkness

Traduction par VD pour le Grand Soir


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