Etats-Unis: Décès d'un hacker qui devait révéler des informations sensibles jeudi
Sale temps pour les hackers "white hat" (chapeau blanc, donc "gentils") : après le suicide en janvier d'Aaron Swartz, 26 ans, c'est le génie Barnaby Jack, 35 ans, qui a été retrouvé sans vie à son domicile de San Francisco jeudi. L'agence Reuters a pu confirmer le décès auprès de la police, sans toutefois obtenir d'informations sur les circonstances du drame. L'homme était notamment célèbre pour avoir mis au jour les faiblesses des distributeurs automatiques de billets (voir la vidéo du "jackpotting"), au grand dam des banques qui avaient tout fait pour décrédibiliser ses découvertes. Lui affirmait avoir travaillé "simplement pour prouver la faiblesse des dispositifs électroniques du quotidien". Deux mondes qui ne pouvaient se comprendre...
Internet s'émeut de la mort du hacker, l'un des leaders des "white hats", d'autant plus qu'il devait dévoiler ce jeudi à la conférence Black Hat de Las Vegas des informations cruciales sur la sécurité des systèmes de santé, dont notamment les pacemakers et les défibrillateurs implantés. Barnaby Jack affirmait que la scène de la série Homeland dans laquelle un homme est tué par la désactivation malicieuse de son pacemaker à distance est parfaitement réalisable. Ses affirmations étaient prises au sérieux, puisqu'il avait déjà prouvé qu'il était capable de détourner une pompe à insuline pour déclencher une dose mortelle à un patient.
Tensions avec les autorités
La proximité du décès avec la conférence durant laquelle il devait mettre en péril les intérêts de puissants lobbies de la santé génère les spéculations les plus folles. Il avait notamment déclaré avoir fait des découvertes "aux conséquences potentiellement fatales". En l'absence d'explications claires sur les circonstances du décès, les théories du complot se multiplient en ligne, parmi ses amis et ses partisans. Selon Reuters, c'est un proche qui a découvert le corps jeudi, et le médecin légiste pourrait avoir besoin d'un mois pour déterminer la cause du décès.
"Sa passion était de dénicher les problèmes de sécurité avant que les individus malicieux ne les découvrent", a rappelé Stuart McClure, qui avait travaillé avec Barnaby Jack pour l'antivirus McAfee. "Il faisait partie de ces gens qui étaient sur Terre pour trouver les vulnérabilités dangereuses pour les gens", a-t-il ajouté. Un représentant du gouvernement américain avait aussi reconnu ses travaux : "Les résultats auxquels Barnaby Jack et d'autres sont arrivés ont largement contribué aux progrès dans le secteur", avait expliqué William Maisel. Son dernier employeur, l'entreprise de cybersécurité IOActive, a salué sur Twitter "son pirate adoré", "décédé mais jamais oublié".
Les organisateurs de la conférence Black Hat ont décidé de ne pas remplacer la session de Barnaby Jack : les participants seront invités à honorer la mémoire du hacker durant l'heure initialement prévue. Cette nouvelle arrive dans un contexte de tension grandissante entre les autorités américaines et la communauté des hackers. Début juillet, l'organisateur de la conférence Def Con avait signifié aux "fédéraux" qu'ils ne seraient pas les bienvenus pour l'édition 2013 du forum, qui permettait pourtant de nouer des alliances entre les agents du gouvernement traquant le crime, et ces "ninjas" de l'Internet. En cause, les révélations sur Prism, le système de surveillance généralisée des internautes du monde entier, qui semblent avoir durablement créé des barrières. Les proches de Barnaby Jack ont mis en place une page de financement collaboratif pour aider la famille.
- Source : Guerric Poncet via Le Point