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La paix, c’est la guerre ; l’obéissance rend libre

Auteur : Régis Chamagne | Editeur : Walt | Samedi, 27 Mai 2017 - 00h04

Les GOPÉ 2017 (grandes orientations pour les politiques économiques) ont été publiées récemment par nos Maîtres de la Commission européenne, en vertu de l’article 121 du TFUE (traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) que je décrypte dans mon livre « Relève-toi ».

Ce texte est relativement court – il compte 9 pages dont 6 pages substantielles – et j’invite chacune et chacun à le télécharger à cette adresse et à le lire intégralement.

Il est écrit dans le style très particulier des fonctionnaires européens, en novlangue ultralibérale. Il commence par l’analyse de la situation sous l’angle ultralibéral, celui de l’argent comptable. Par exemple, on dira que les dépenses de santé coûtent trop cher, mais on ne relèvera jamais qu’un système de santé nationalisé produit beaucoup plus de santé publique par franc dépensé qu’un système privé à l’américaine. Consécutivement à l’analyse, il présente les contre-réformes que nos Maîtres de Bruxelles attendent de leurs vassaux parisiens en des termes positifs. j’ai retenu quelques exemples pour cet article.

Morceaux choisis

(3) En particulier, la France se caractérise par un faible niveau de compétitivité et une dette publique élevée et en augmentation, dans un contexte de faible croissance de la productivité.

En novlangue de Bruxelles, faible compétitivité signifie salaires trop élevés et dette publique est à rattacher à services publics.

(9) Les économies découlant des revues de dépenses pourraient être nettement augmentées si les domaines de dépenses examinés étaient élargis et si une stratégie pluriannuelle était mise en œuvre afin que les possibilités d’économies identifiées se traduisent par des mesures budgétaires concrètes.

Cela signifie que Bruxelles exige une baisse des investissements publics sur le long terme. Les deux éléments de la phrase sont importants : investissements publics et long terme.

(10) De récentes évaluations suggèrent également que le regroupement de tous les dispositifs de réduction du coût de la main-d’œuvre et leur transformation en réductions permanentes des cotisations sociales permettraient d’optimiser leurs effets sur l’emploi et l’investissement.

Cela signifie que Bruxelles exige une réduction des salaires en France, en particulier de la part des salaires dédiée aux cotisations sociales. Cette part des salaires que les salariés ne perçoivent pas directement car elle est gelée pour assurer leurs retraites et leur protection sociale. Ces mesures engendreront donc naturellement une baisse des retraites et de la protection sociale via le système de sécurité sociale. Cela dit, on pourrait penser que ceci pourrait profiter aux PME. Il n’en est rien. Souvenons-nous que l’an dernier, dans les GOPÉ 2016, la Commission constatait qu’il y avait trop de PME en France. Leur sort sera réglé par l’imposition de normes qu’elles ne pourront pas payer et par un alourdissement de leur environnement administratif. Cette mécanique insidieuse et implacable est déjà à l’œuvre et elle s’intensifie. Posez la question aux patrons de PME.

(13) La mauvaise performance des personnes nées en dehors de l’UE tire le taux d’emploi global vers le bas et représente une sous-utilisation chronique de la main-d’œuvre.

On pourrait penser qu’il s’agit d’une intention humaniste et égalitaire. Point du tout. Il s’agit ni plus ni moins que de faire pression sur les salaires en employant des travailleurs étrangers qui accepteraient d’être sous-payés. C’est ce que dénonçait le PCF (Parti communiste français) dans les années 1970. C’est ce que dénonçait Jean Jaurès en son temps.

(14) En outre, dans le contexte actuel de chômage élevé, le coût du travail au salaire minimum risque de restreindre les perspectives d’emploi des personnes peu qualifiées.

Ici, les choses sont dites sans ambiguïté, il faut baisser le SMIC.

Structurellement vôtre

Un des mots qui revient le plus souvent, tout au long de cette prose absconse, est le mot structurel. Pour la Commission européenne, les mesures de baisse salariale, de réduction d’impôt aux entreprises, de baisse des cotisations de sécurité sociale, de mise en concurrence des salariés, ex-cetera, ne doivent pas être passagères, elles doivent s’inscrivent dans le long terme, c’est-à-dire qu’elles doivent structurer la société française, en espérant bien évidemment que l’on ne puisse pas revenir à une politique sociale… Jusqu’à la prochaine révolution.

Les conclusions de Bruxelles : le résultat de la soumission

À la toute fin de ces GOPÉ, nos Maîtres font la synthèse de ce qu’ils attendent de leurs dociles esclaves parisiens. Je vous livre in extenso ce résumé. À lire soigneusement et lentement. À décrypter méticuleusement avec un dictionnaire de traduction de la novlangue en langue française.

RECOMMANDE que la France s’attache, au cours de la période 2017-2018, à:

1. se conformer à la recommandation du conseil du 10 mars 2015 au titre de la procédure concernant les déficits excessifs. Poursuivre ensuite une politique budgétaire conforme aux exigences du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance, qui se traduise par d’importants efforts budgétaires pour 2018. Lors de l’adoption de mesures, il convient de prendre en considération l’objectif d’une orientation budgétaire qui contribue aussi bien à conforter la reprise actuelle qu’à garantir la viabilité des finances publiques de la France. Réexaminer de manière exhaustive les postes de dépenses dans le but de réaliser des gains d’efficacité qui se traduisent par des réductions de dépenses ;

2. consolider les mesures de réduction du coût du travail afin d’optimiser leur efficacité de manière budgétairement neutre et d’accroître leurs effets sur l’emploi et l’investissement; élargir l’assiette globale de l’impôt et poursuivre la mise en œuvre de la diminution prévue du taux nominal de l’impôt sur les sociétés ;

3. améliorer l’accès au marché du travail des demandeurs d’emploi, notamment les travailleurs les moins qualifiés et les personnes issues de l’immigration, y compris en revoyant le système d’enseignement et de formation professionnels; veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec la création d’emplois et la compétitivité ;

4. poursuivre la réduction des charges réglementaires pesant sur les entreprises, y compris en poursuivant le programme de simplification; continuer à lever les barrières à la concurrence dans le secteur des services, y compris dans les services aux entreprises et les professions réglementées; simplifier les programmes de soutien public à l’innovation et en améliorer l’efficience.


- Source : Régis Chamagne

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